Oui et... non ;) Pour nous positionner, commençons par rappeler quelques-uns des principes (l'ordre dans lequel ils sont énoncés ne présument pas de leur importance) sur lesquels les écoles démocratiques se rejoignent (étant donné qu'il n'existe pas de corpus unifié pour en définir la pédagogie) :
1) la différence élève (enfant) - professeur (adulte) est au maximum aplanie ; 2) la participation équitable dans la prise de décision; 3) l'élève est considéré comme autonome et peut donc décider, en fonction de ses envies, ce qu'il va ou non étudier, les cours auxquels il va ou non assister. Dès lors, (A) il n'y pas de programme scolaire officiel : ce que chaque élève fait est considéré comme son propre programme et (B) l'élève peut ne pas participer aux cours proposés et occuper son temps à sa guise ; 4) le désir d'apprendre est inné et considéré comme suffisamment fort pour motiver les enfants dans leur parcours scolaire : en ce sens, cela peut prendre du temps, mais chaque enfant finirait par intégrer les savoirs dits "fondamentaux" parce que viendrait toujours le moment où il en ressentirait, si pas l'envie, du moins le besoin ; 5) ce qui s'apprend à l'école doit être représentatif de la vie en dehors de celle-ci ; 6) une éducation pluraliste ; 7) une gestion des conflits par le dialogue et non par la punition ; 8) une considération élargie des savoirs fondamentaux, lesquels ne se limitent donc pas aux langues, aux mathématiques et aux sciences ; 9) une place importante est laissée aux jeux (qu'ils soient ou non électroniques), auxquels les élèves s'adonnent tout à fait librement, compte tenu de leur impact jugé particulièrement positif sur la créativité.
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Si nous rencontrons presqu'entièrement les points (5), (6), (7) et (8) (et de façon nuancée le point (2), autrement dit nous insistons sur une participation équitable mais refusons une participation égale « 1 personne = 1 voix » tout comme nous pensons que la majorité n’a pas nécessairement raison… : la voix divergente est parfois – pas toujours ;) – la plus juste et la plus porteuse), nous nous distinguons des écoles démocratiques quant aux autres points, les rencontrant à certains endroits, ne nous y retrouvant absolument pas à d’autres (les jeux en ligne (9) sont proscrits à L'EAV, n'hésitez pas à nous demander pourquoi!).
À L'EAV, il n'est pas possible de (3) ne faire que ce dont on a envie. Nous estimons en effet que la vocation de l’école est de faire advenir les enfants à leur autonomie et que pour remplir cette mission, ceux-ci ont besoin d’être encadrés et guidés : en ce sens, s’il n’y a pas de hiérarchie entre les élèves et les membres du corps enseignants (1), il y a néanmoins entre eux une profonde asymétrie (l’expérience, le bagage, les connaissances sont différents ; et si nous sommes tous élèves les uns des autres, si nous apprenons effectivement ensemble, certains sont néanmoins là pour guider les autres dans leurs apprentissages). Un enfant, s’il est d’emblée libre et aspire à son indépendance, n’est pas automatiquement autonome. Nous avons la mission d’élargir l’horizon des élèves qui s’inscrivent chez nous, ce qui passe par l’apprentissage de savoirs et de compétences dont l’enfant ne peut pas toujours percevoir l’intérêt (4) : c’est en étant plongé dans la piscine que l’on découvre si l’on aime l’eau, pas en refusant d’y entrer parce qu’on se dit que « l’eau, ce n’est pas pour moi » ; c’est en plongeant dans la piscine que l’on apprend à nager : que l’on aime ou pas cet exercice, il s’agit néanmoins d’un apprentissage essentiel, qui peut nous sauver la vie et en sauver d’autres. Cela ne veut pas dire que l’on est obligé d’aimer nager, de devenir un champion en natation synchronisée ou de passer plus de temps qu’il n’en faut dans l’eau pour apprendre les basiques de la nage. Ensuite, si nous nous distinguons de l’enseignement traditionnel (cfr notre site : www.ecole-a-vivre.com ou 0496/30.20.60), nos élèves présentent néanmoins les épreuves externes certifiantes propres à la Communauté française : ainsi, bien que nous empruntions des chemins d’apprentissage qui s’écartent de l’orthodoxie traditionnelle, le programme de base exigé par la Communauté française se doit d’être maitrisé, dans les temps exigés pour répondre à l’obligation scolaire. Cela ne veut pas dire que tous ont exactement le même programme, loin de là. Mais une base commune est selon nous nécessaire, faute de quoi, une fois que « l’école est finie », l’enfant qui n’en est plus un risque de ne pas pouvoir prendre place – et encore moins prendre SA place – dans le monde. Enfin, nous mettons tout en œuvre pour contribuer à l’advenue de jeunes gens capables de faire des choix mûrs et éclairés pour eux-mêmes, ce qui impliquent la prise en considération des autres et du monde dans lequel habitent les uns et les autres. Etre capable de faire « des choix mûrs et éclairés » (= être autonome) ne signifie pas « faire ce que l’on veut quand on le veut comme on le veut » (= liberté-indépendance). C’est ce que TOUS nos élèves ont appris cette année. Cela ne veut pas dire qu’on ne peut pas faire ce qui nous semble bien pour nous ou ce dont on a envie. En fait, on peut faire ce que l’on veut, A CONDITION que cela s’intègre dans la visée première de l’école et de ses acteurs : apprendre, intégrer savoirs et compétences pour pouvoir jongler avec ceux-ci et participer ainsi à l’élaboration de nouveaux savoirs et compétences dont notre monde – aujourd’hui plus que jamais – a tellement besoin.
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